Résumé :
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La surveillance des épidémies de maladies infectieuses se fait traditionnellement par le recensement individuel des cas cliniques, de la mortalité et des dépistages. Le suivi collectif par l’analyse de biomarqueurs dans les eaux usées est une nouvelle approche complémentaire qui se développe grâce aux progrès analytiques. Dans le cas des maladies infectieuses virales, elle accompagne les études épidémiologiques pour l’estimation de la prévalence au sein de la population raccordée à un même réseau de collecte des eaux usées. Dans le cadre de la pandémie de Covid-19, ce type d’approche s’est largement et rapidement développé dans le monde en raison des avantages espérés. L’article s’appuie sur les premiers travaux publiés depuis janvier 2020 dans une littérature en évolution rapide. Il montre que la méthode présente des limites liées notamment à la stratégie d’échantillonnage, aux effets analytiques de matrice, à la variabilité inter-laboratoires des résultats, et aux incertitudes sur l’excrétion virale individuelle dans les fèces. Elle utilise, dans la quasi-totalité des cas, une détection par PCR quantitative du génome du virus SARS-CoV-2 et n’est donc pas en mesure de caractériser son infectivité. Les résultats montrent une relation relativement bonne entre la concentration du génome dans les eaux usées et le nombre de cas infectieux confirmés. Les détections de virus semblent apparaître quelques jours avant les évolutions constatées sur la base de la clinique et des dépistages. Cela permettrait aux autorités sanitaires d’être alertées de la progression géographique d’une épidémie attendue ou d’anticiper leur réaction en cas de nouveau départ d’une épidémie en cours. La connaissance des tendances évolutives de la contamination par le virus des eaux usées dans des communes, voire des quartiers de villes, permet aussi de mieux cibler géographiquement et au fil du temps les actions de santé publique destinées à faire barrière à sa circulation dans la population desservie par leurs réseaux d’assainissement. En lien avec la surveillance sanitaire, la méthode a vocation à contribuer au développement de modèles épidémiologiques permettant de prévoir l’évolution de la pandémie à l’échelle locale. Elle est appelée à se développer en surveillance de site sentinelle permanente sur les territoires, fournissant en temps réel des indications épidémiologiques précoces. Cette surveillance des eaux usées peut aussi alimenter une banque d’échantillons témoins pour l’analyse rétrospective des premiers temps d’épidémies virales sur un territoire. (R.A.)
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