Résumé :
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[BDSP. Notice produite par INIST-CNRS EGCER0xA. Diffusion soumise à autorisation]. Objectif. Cette étude a pour objectif de quantifier la part du travail dans les gestes suicidaires et de rechercher des facteurs du travail décompensateurs ou protecteurs. Méthode. La méthode utilisée est une enquête transversale descriptive monocentrique par entretiens individuels de salariés ayant fait un geste suicidaire et interrogés lors de leur séjour à l'unité d'hospitalisation de courte durée du CHU de Caen. L'entretien est basé sur un questionnaire comportant des variables quantitatives par échelle analogique, en lien avec des données qualitatives (données générales, données du travail, liens travail-hors-travail, données sur le geste suicidaire) et une reconstruction du parcours professionnel ayant précédé le geste suicidaire. Résultats. L'enquête incluant 70 patients révèle une population stable, en CDI dont les anciennetés dans l'entreprise et au poste de travail sont importantes. Pour ces salariés, la valeur du travail dans l'équilibre psychique et les attentes du travail sont majeures. Pour 40% des salariés, le travail est l'élément principal de leur geste suicidaire, avec dans un cas sur deux la situation de travail comme origine unique du geste. Des idées suicidaires précédant le geste sont retrouvées dans 74% des cas et un événement déclenchant est identifié pour 70% des patients provoquant le passage à l'acte dans les 24 heures pour plus d'un tiers des cas. La comparaison statistique de la population pour laquelle le travail est l'élément principal du geste versus les autres salariés ne montre pas de différence significative pour l'âge, le sexe, les antécédents psychiatriques, l'antériorité de geste suicidaire, l'âge de la première tentative de suicide ou la présence d'un événement déclenchant. Au travail, les attentes, l'estime de soi, l'intensité et les responsabilités ne sont pas différentes. Des différences significatives apparaissent en ce qui concerne le vécu global du travail, les difficultés au travail, les relations hiérarchiques et le délai du passage à l'acte dans les 24 heures lorsqu'il existe un événement déclenchant au geste. L'analyse qualitative identifie des facteurs professionnels protecteurs du passage à l'acte et des facteurs décompensateurs. L'étude des parcours professionnels, quand la situation de travail est le facteur principal du geste suicidaire, permet de construire la dynamique temporelle des événements de vie au travail montrant une longue histoire de souffrance au travail ponctuée d'évènements communs. Conclusion. L'enquête montre ainsi la place centrale du travail en tant que protecteur ou décompensateur de la santé mentale et physique. L'interrogatoire "travail" avec ses différentes composantes doit donc être développé non seulement dans le cadre de patients suicidaires mais aussi de tout autre patient exerçant une activité professionnelle. Il va permettre, à la fois, la verbalisation du vécu du travail avec ses éventuelles difficultés et/ou ses éléments constructeurs de la santé, et le développement d'actions de prévention tant individuelles que collectives.
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