Résumé :
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) Sans doute, le service public est-il tenu d'être de "qualité" : mais ne s'agit-il pas là d'une évidence, voire d'un truisme ? (
) Impératif, axiologique commandant la légitimité des services publics. La qualité ne présenterait aucun des attributs permettant de l'élever à la hauteur d'un principe juridique : le flou entourant sa définition, l'ambivalence de son contenu, l'absence d'instruments précis de mesure excluraient toute possibilité de traduction en termes juridiques, tout processus de juridicisation. Comment dès lors bâtir une thèse sur une notion fluide, mouvante, insaisissable, chargée de jugements de valeur et porteuse d'effets de légitimation ? (
) La démonstration effectuée séduit par sa rigueur et sa cohérence. La démarche inductive suivie permet de progresser pas à pas, en remettant en cause beaucoup d'idées reçues : l'idée que la démarche qualité révélerait un mouvement de banalisation de la gestion publique (la thèse montre au contraire qu'elle a des implications spécifiques pour les services publics) ; l'idée de la démarche qualité mettrait en cause la rationalité juridique commandant la gestion publique (la thèse montre au contraire qu'elle ne se situe pas, ou plus, en marge du droit). Au-delà de ces apports, le travail offre un terrain de choix pour analyser le processus de construction des catégories juridiques : on voit comment un principe managérial, conçu en fonction de l'évolution du contexte socio-économique, va être progressivement saisi par le droit, comment il sera lui-même phagocyté par l'empreinte de la rationalité juridique et comment il contribuera en retour à faire évoluer le droit existant ; il souligne aussi la logique d'interaction qui existe désormais entre les ordres juridiques interne et externe. On peut sans doute ne pas partager toutes les conclusions de l'étude : le terme de la qualité ne reste-t-il pas porteur de trop d'incertitudes, de potentialités différentes, voire de contradiction (le souci de rapidité n'est-il pas par exemple antinomique avec l'exigence de qualité des prestations ?) pour être érigé en "principe", à l'aune duquel l'action des services publics sera évaluée et éventuellement sanctionné ? L'auteure reste suffisamment nuancée dans ses analyses pour éviter tout schématisme : la structure même de l'argumentaire permet au demeurant de s'arrêter à l'une des étapes de la démonstration, sans suivre l'auteure jusqu'au bout de son raisonnement ; et ce n'est sans doute pas le moindre mérité du travail que de laisser ainsi ouvert le champ des interprétations.
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