Résumé :
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La psychiatrie de liaison n'est pas une simple pratique de la psychiatrie transposée dans les hôpitaux généraux. Confrontée à des patients présentant des affections somatiques graves, elle doit repenser ses modèles cliniques et ses concepts pour les ajuster à un contexte où la question des liens entre soignants et soignés se pose de manière cruciale et récurrente. Pour ces patients, l'épreuve d'une maladie est toujours pire lorsque s'ajoutent des divisions qui les empêchent de se faire entendre. Or, ce qu'ils ont à dire est souvent dans l'indicible : un agrégat de contenus traumatiques et d'éprouvés corporels attaquant leur capacité de penser et donc de les contenir. La fonction du psychiatre de liaison qui est de la rétablir passe par un préalable : celui d'accéder à ces zones psychiques irreprésentables et les rendre figurables. La notion métaphorique d'effraction peut à cet égard être très utile pour rendre compte de violences tramatiques subies par ces patients, du fait de leur maladie, des traitements et même des discours tenus sur eux dans leur environnement médical, familial ou social ; des éléments qui, tels des corps étrangers, pénètrent leur vie psychique pour en prendre possession durablement. Cette notion d'effraction d'origine juridique ajoute à celle de trauma, métaphore d'origine médico-chirurgicale, une dimension particulière et sans doute ici plus appropriée : celle d'une aliénation.
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