Titre : | Dossier : « Vouloir agir » face aux défis de l’alimentation des personnes âgées (2024) |
Auteurs : | Philippe Cardon, coor. ; Claire Billy ; Aline Corvol ; Dominique Somme ; et al. |
Type de document : | Article |
Dans : | Gérontologie et société (vol. 46, n° 175, 2024) |
Pagination : | p. 11-231 |
Langues: | Français |
Mots-clés : | Alimentation ; Comportement alimentaire ; Consommation alimentaire ; EHPAD ; Personne âgée ; Vieillissement ; Petit déjeuner ; Déglutition ; Boisson ; Repas ; Malnutrition ; Soutien domicile ; Habitat inclusif ; Citoyenneté ; Formation continue ; Sécurité ; Soignant ; Gériatrie ; Conflit génération ; Centre jour ; Travail pluridisciplinaire ; Démence Alzheimer ; Consommation alcool ; Côte d'Ivoire ; France |
Résumé : |
Sommaire du dossier : « Vouloir agir » face aux défis de l’alimentation des personnes âgées / Par Philippe Cardon
Partie 1. Vouloir agir sur les prises alimentaires : - Quelles boissons pour les résidents d’Ehpad ayant des troubles de déglutition ? / Par Claire Billy, Aline Corvol et Dominique Somme : Les troubles de la déglutition sont à l’origine d’une morbidité importante chez les résidents des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Cette étude propose d’explorer les modalités de choix des produits utilisés, ainsi que la perception qu’ont les résidents et les professionnels les accompagnant des boissons épaissies tant en termes hédoniques que pragmatiques et de modalité de choix.Cette étude exploratoire a comporté deux étapes : la première, téléphonique, visait à recenser les produits utilisés et à comprendre les modalités du choix ; la deuxième, par questionnaire, évaluait l’expérience utilisateur des résidents et des soignants. Nous constatons un usage large d’eau gélifiée, sans protocole clair concernant les indications d’utilisation, la réévaluation de cette indication et le choix exact du produit. Certains patients expriment ne pas être satisfaits de ces produits, ce qui ne semble pas remettre en cause leur utilisation. Les entretiens avec les directeurs ont montré leur faible implication sur cette question et l’absence de lignes de conduite claires dans leurs établissements. Ce flou autour de l’utilisation des eaux gélifiées est à mettre en lien avec son statut d’aliment, alors que l’usage inadapté de ce produit peut entraîner des risques de déshydratation ou de pneumopathie. - Perspectives et retours d’expériences. Dilemme éthique en dysphagie : désir de manger solide au prix de la sécurité / Par Adélaïde Doussau : La survenue d’une dysphagie et la dépendance culinaire entraînent un grand bouleversement dans l’équilibre de vie des patients et dans leur entourage. Les tensions peuvent s’exacerber lors d’un changement de milieu de vie (ex. admission en établissement de soins de longue durée). M. P. est un patient dysphagique atteint d’une maladie neurodégénérative motrice qui refuse l’adaptation nutritionnelle. À partir de ce cas inspiré de situations réelles, nous proposons d’analyser les enjeux éthiques et les options possibles, à l’aide de la grille de Guy Durand et Céline Crowe. Cette analyse de cas permet une réflexion sur la tension entre l’autodétermination du patient, la sécurité des soins, le sens de la vie en situation de dépendance et de grand handicap. Partie 2. Vouloir agir sur la commensalité : - Plaisir et prise alimentaire en Ehpad : aménagement de la salle de restauration / Par Nathalie Bailly, Geoffrey Ventalon et Manon Taillefer : En France, il est estimé qu’entre 15 à 38 % des résidents en Ehpad sont dénutris. Dans ce contexte, l’objectif de cette étude est d’évaluer les effets de l’aménagement physique d’une salle de restauration sur la prise alimentaire des résidents vivant en Ehpad ainsi que leurs interactions sociales et leur plaisir alimentaire. L’étude mise en place est une étude interventionnelle comportant deux situations : une situation contrôle dans laquelle l’environnement de prise de repas n’a pas été modifié (N = 7) et une situation expérimentale dans laquelle l’environnement a été modifié (N = 9). L’intervention consiste à modifier l’ambiance de la salle de restauration afin de la rendre plus conviviale (i.e., décoration, musique) et ceci à raison de 2 jours par semaine pendant 4 semaines (8 séances au total). Les résultats montrent que les résidents déjeunant dans un environnement plus convivial consomment davantage l’entrée et le plat (mais pas le dessert), qu’ils ont un plaisir à manger important et qu’ils ont davantage d’interactions sociales (entre résidents et entre résidents et soignants) comparativement aux résidents du groupe sans intervention. Compte tenu de la problématique nutritionnelle en Ehpad, cette étude propose une piste prometteuse pour améliorer à moindre coût le plaisir de manger et la prise alimentaire chez des personnes âgées dépendantes. - Vieillir et faire vivre ses pratiques alimentaires dans un habitat inclusif. Une approche compréhensive des pratiques individuelles et collectives / Par Hélène Trimaille, Camille Ravat et Aline Chassagne : Penser un habitat, c’est penser les actes de la vie quotidienne, parmi lesquels les pratiques alimentaires structurent le quotidien et les interactions. Avec l’avancée en âge, elles sont bouleversées et engendrent parfois un appauvrissement nutritionnel pouvant remettre en question la possibilité de vieillir à domicile. L’objectif de l’étude est d’explorer les pratiques alimentaires individuelles et collectives de personnes âgées résidant au sein d’un habitat dit inclusif. Le recueil de données s’appuie sur des observations, notamment dans un espace commun d’un habitat inclusif. Deux entretiens collectifs ont été animés avec une dizaine de personnes et des entretiens individuels ont été réalisés auprès de 8 habitants avec la passation d’une échelle d’évaluation de la dénutrition. Malgré quelques solidarités de voisinage, les pratiques alimentaires individuelles demeurent impactées par l’isolement social, la précarité et une confusion dans les recommandations nutritionnelles engendrant pour certains un risque de dénutrition. Si des habitants se sont fédérés pour accéder de façon plus libre à la salle commune et qu’une forme de commensalité émerge dans l’espace collectif, grâce à la place centrale de l’animatrice et d’habitantes, des conflits d’usage et rapports de domination viennent l’entraver. L’observation des pratiques alimentaires des personnes âgées résidant en habitat inclusif montre qu’au niveau individuel, les pratiques alimentaires restent inchangées et que sans projet social et spatial collectif émanant des habitants, la commensalité, pourtant portée comme vecteur de la lutte contre la dénutrition, ne peut prendre vie et se pérenniser. - Perspectives et retours d’expériences. Alimentation et vieillissement : expérience d’un p’tit déj chez l’habitant / Par Nasser Bouzouika : Je suis psychologue clinicien exerçant en Ehpad. Je souhaite faire un retour d’expérience concernant un dispositif intitulé P’tit déj chez l’habitant. L’idée du projet était d’insuffler une nouvelle dynamique chez les personnes âgées, consistant à faire évoluer la posture d’attente, à celle d’être attendu. Pour cela, je me suis appuyé sur l’alimentation, ou l’acte de manger, en proposant aux résidents de partager un petit déjeuner chez des habitants désireux de les accueillir. Ce dispositif avait deux objectifs : d’une part, lutter contre l’isolement de personnes atteintes de maladie neurodégénérative de type Alzheimer, d’autre part, engager une rencontre entre des habitants et des résidents pour vivre un moment convivial. Ainsi, je propose la restitution problématisée d’un dispositif qui s’étaye sur l’ancrage alimentaire à travers le partage d’un petit déjeuner. La réalisation de ce dispositif a vu le jour grâce à un croissant mangé à une terrasse de café avec une résidente : raison originelle du choix concernant le petit déjeuner chez l’habitant. L’analyse consiste à mettre en évidence les difficultés rencontrées lors de la mise en place de ce dispositif et la manière dont l’outil alimentation a été une porte d’entrée pour faire rencontre. Partie 3. Vouloir éduquer à une « bonne » alimentation : -« J’ai mangé pour la semaine ! ». Se nourrir au grand âge par l’éducation permanente / Par Marin Buyse et Cayetana Carrión : Au grand âge, la perte d’autonomie, la fatigue, l’isolement, la mobilité, la maladie constituent autant de freins supplémentaires à la possibilité de bien se nourrir. À partir des échanges au cours de tables de réflexion menées avec plusieurs groupes de personnes âgées en Région wallonne, en Belgique, cet article explore les évolutions de leur assiette tout au long de leur parcours biographique. L’outil d’animation « Mon assiette au fil de la vie », mis en place par l’association Âgo durant les mois de juin 2023 à janvier 2024 dans le cadre d’un projet d’éducation permanente sur l’alimentation durable, encourage la prise de conscience des participants et est propice à la définition, voire à la découverte, de pistes promouvant une nourriture saine, équilibrée et adéquate au grand âge. En cela, le dispositif que nous avons mobilisé éclaire, à partir du point de vue des principaux concernés, les préoccupations des seniors sur les enjeux du vieillissement et de l’alimentation. -La prévention par la cuisine à destination des personnes âgées. Des normes alimentaires à l’épreuve du quotidien / Par Julie Mayer : La France fait face au défi d’augmenter l’espérance de vie en bonne santé de ses habitants afin de limiter la dépendance et le recours aux soins. Dans un contexte de nutritionnalisation et d’optimisation de soi, la prévention de la santé des personnes âgées passe par la transmission de normes diététiques et la cuisine s’impose comme un instrument de prévention. L’analyse des interactions dans 25 ateliers de cuisine, des représentations et des discours des intervenants (22 intervenants interrogés) et ceux des participants (42 personnes âgées de 60 à 90 ans interrogées) permet de comprendre l’utilisation qui est faite de la cuisine et des recettes : tout d’abord, la socialisation voulue par les intervenants, par l’oral, l’écrit et les gestes. Par ailleurs, des participants qui perçoivent le potentiel de l’atelier en matière de sociabilités, de perfectionnement de pratiques et d’apprentissages diététiques. Le changement de pratique dans le quotidien des participants suite à l’atelier est discuté sous l’angle du pouvoir de normalisation et d’innovation. Si cette étude vient montrer comment ce type d’atelier peut s’inscrire dans une dynamique de déprise, il met également en lumière la nécessité d’adapter la prévention par la cuisine à la pluralité des trajectoires de vieillissement. Partie 4. Vouloir écouter la parole : - Quand l’aliment se fait langage. Enjeux psychiques de l’alimentation en gériatrie / Par Christine Louchard Chardon et Nathalie Dumet : Comment entendre et comprendre ce qui s’exprime pour la personne âgée hospitalisée autour de l’alimentation ? Comment en tenir compte dans la prise en charge soignante ? À partir du cas de Mme Comer, hospitalisée en service de Soins de Suite et Réadaptation (SSR), les auteurs montrent comment la fixation du sujet sur certains aliments constitue un support essentiel de la continuité de Soi au grand âge et une lutte contre la désorganisation à laquelle l’autre, le soignant, est activement convié. Après avoir rappelé, d’une part, l’importance de l’alimentation à l’hôpital pour le sujet âgé et, d’autre part, les grandes fonctions et significations psychoaffectives de l’alimentation, l’étude du cas de Mme Comer permet d’illustrer la manière dont la régression s’opère pendant le temps long de l’hospitalisation et vient reconvoquer les imagos et figures parentales, les modalités primaires de liens et la prédominance de l’oralité. L’enjeu pour la patiente n’est pas tant, ou pas seulement, la consommation de l’aliment lui-même que l’accueil et l’écoute par un autre de sa demande. Le rapport à l’alimentation et les conflits autour de celle-ci s’inscrivent fondamentalement dans une adresse à un autre, en l’occurrence ici au soignant. Cet article a pour finalité de soutenir les professionnels dans leur réflexion et leur positionnement en éclairant les dynamiques intra- comme inter-psychiques à l’œuvre lors de situations alimentaires sources d’incompréhension en institution. - Libre propos. « C’est mieux à la résidence ! » Témoignage de repas partagés en ADJ Alzheimer / Par Marianne Berque : L’alimentation en Ehpad est au croisement de différents services très encadrés ; chacun applique ses contraintes qui s’accumulent et deviennent difficiles à coordonner avec l’équilibre psycho-corporel, qui devrait pourtant être recherché par tous les intervenants dans une vision holistique de la personne. Ainsi, les résidents en pâtissent, mais aussi les soignants et les cuisiniers. Dans ce contexte, le rythme de l’Accueil de jour Alzheimer offre ce que ne permet pas toujours l’Ehpad : un équilibre entre vie en société et intimité, une continuité de soi, un accompagnement évolutif. La démarche, basée sur l’observation et l’écoute des besoins de chacun, fait appel à la créativité et parfois simplement à un retour à des pratiques humaines ancestrales qui ont été écrasées par la société de consommation. Ce modèle à petite échelle peut-il donner des pistes pour des structures plus grandes ? Des projets surgissent, mais le sujet ne semble pas encore suffisamment organisé pour devenir pérenne et nécessiterait que l’ensemble des personnes concernées se rassemblent pour y réfléchir, ensemble. Partie 5. Regard d’ailleurs : -Pratiques alimentaires et expériences du vieillissement en milieu urbain, Abidjan / Par Taté Roger Oulahi, Alladé Frédéric Aka, Abo Jean-Franck Kouadio et Arsène Bogro : La présente étude analyse les pratiques alimentaires des personnes âgées de 65 ans et plus, en contexte de vie à domicile, en milieu urbain. Elle vise à rendre compte des diverses expériences du vieillissement dans le rapport à l’alimentation. Un échantillonnage à choix raisonné a permis de sélectionner 14 seniors dans la commune de Yopougon et 7 dans la commune de Koumassi. Au total, 21 entretiens ont été réalisés du 18 au 25 septembre 2023. Il ressort de cette analyse trois faits majeurs : l’avancée en âge et le discours de santé publique influencent les habitus alimentaires des personnes âgées ; une difficulté d’accès à certains produits alimentaires eu égard à la baisse de leur pouvoir d’achat ; les acteurs familiaux intervenant auprès des personnes âgées jouent un rôle important dans leurs expériences de vieillissement, notamment en matière d’alimentation. Ces résultats sont utiles pour une prise en charge alimentaire des seniors. Rubrique débat : -Des bars en Ehpad : promotion de la citoyenneté des résidents ou leurre potentiellement risqué ? / Par Nicolas Foureur et Ingrid Voléry ; -Faut-il ouvrir des bars en Ehpad ? Une tentative de prise de distance / Par Antoine Gérard ; -Boire au bar en Ehpad : défense de droits du citoyen ou imposture ? / Par Dominique Somme ; -Comment réfléchir la consommation d’alcool en Ehpad ? / Par Jean Saric. |
En ligne : | https://shs-cairn-info.ehesp.idm.oclc.org/revue-gerontologie-et-societe-2024-3?lang=fr |
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