Résumé :
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Comment comprendre la prégnance d’un discours médical insistant sur les risques de l’avortement, en contradiction avec la littérature scientifique et en décalage avec la relative sûreté de l’intervention médicale telle qu’elle est pratiquée en France aujourd’hui ? Cet article met en lumière la manière dont la structure du champ médical favorise la reproduction de l’ignorance en matière d’avortement. Il décrit les luttes de pouvoir qui le traversent et dotent d’un statut d’expert·e les médecins les plus dominant·es – les gynécologues-obstétricien·nes, a fortiori celles et ceux qui occupent les postes à responsabilités au sein de la profession – tout en limitant l’audience des médecins plus dominé·es – souvent généralistes – qui se spécialisent dans l’avortement et affirment son innocuité. Il souligne le rapport instrumental aux savoirs que peuvent avoir les médecins et analyse la manière dont ils et elles produisent, parfois intentionnellement, l’ignorance : en consultation, en faisant craindre aux avortantes les conséquences de leur comportement procréatif, afin d’orienter leurs « choix » et de façonner des dispositions contraceptives ; dans les prises de position publiques des dominant·es du champ s’opposant aux projets de libéralisation de l’avortement au nom de sa dangerosité supposée.
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