Résumé :
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Les travaux sur les inégalités sociales de santé se concentrent en général sur la santé des classes populaires, et de plus en plus sur la santé des personnes migrantes en situation de précarité administrative et sociale, laissant dans l’ombre ce que la santé des classes dominantes dit aussi du système des inégalités. Une enquête par entretiens et par observation, menée dans deux maternités privées d’Île-de-France, montre comment ces services parviennent, malgré leur faible niveau de spécialisation médicale et de technicité, à recruter et fidéliser une clientèle nationale et internationale privilégiée en transformant une offre médicale ordinaire en bien rare et distinctif : dans la première maternité, accueillant des femmes situées au pôle économique des classes dominantes, l’entretien de la clientèle repose sur une offre hôtelière de luxe mais aussi sur la pratique d’examens ou traitements présentés comme inaccessibles dans d’autres hôpitaux, notamment publics ; dans la seconde maternité, accueillant des femmes relativement plus dotées en capitaux culturels, l’entretien de la clientèle passe par la promotion d’une pratique de l’accouchement minimisant les gestes techniques. Ces deux maternités diffèrent également par leur rapport à la clientèle étrangère, bienvenue dans la première maternité, qui déploie des formes culturalistes de recrutement de cette clientèle et légitime ses pratiques dérogatoires aux normes médicales par une rhétorique universaliste.
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