Résumé :
|
Suite à la désinstitutionalisation des soins psychiatriques que le Maroc a connue vers les années 70, la famille, longtemps considérée comme responsable de la maladie du proche patient, est devenue un partenaire privilégié de soins. Ce changement a eu comme résultat le transfert d’une part importante des responsabilités de l’hôpital et de l’État aux familles en les obligeant à côtoyer la maladie mentale de près et au quotidien. Le but de cet article est d’explorer le vécu des aidants familiaux marocains qui prennent en charge un proche atteint d’un trouble mental. Des entretiens semi-directifs ont permis d’approcher l’expérience de 30 aidants et ont fait ressortir que ces derniers souffrent d’un lourd fardeau : bouleversements des relations familiales, perturbation des activités professionnelles, réactions émotionnelles pénibles, sentiment de culpabilité. De même, la crainte de l’imprévisibilité et de la dangerosité potentielle du proche malade imprègne le vécu des familles et mène parfois à la perte des liens sociaux. De fait, l’hospitalisation constitue un répit qui soulage les aidants temporairement de leur fardeau malgré le spectre de la stigmatisation qui entoure encore l’hôpital psychiatrique. L’analyse des entretiens montre aussi que face à ce vécu difficile, teinté de peur et de stigmatisation, les aidants développent des stratégies d’adaptation (coping) afin de pouvoir continuer à prendre soin de leur proche.
|