Résumé :
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Que font exactement les sciences humaines ? La philosophie veut rendre les raisons dernières de la pensée, voire de ses antinomies ; l'histoire, dire ce que furent réellement les situations et les actions ; la sociologie, expliquer le jeu des intentions des acteurs et des contraintes collectives ; l'économie, dévoiler les mécanismes autonomes de la production et de l'échange. Toutes, à leur manière, tiennent pour acquise la réalité objective de leurs objets. Aucune ne repart de la question radicale posée par l'auteur : comment une réalité mentale, un monde de la conscience de l'intentionnalité s'ajustent-ils à un monde entièrement constitué de particules dans des champs de force ? En effet, du monde physique, les sciences, telles la chimie ou la physique, rendent compte. Mais des faits sociaux, qui ne tirent leur réalité que des hommes, comment rendre compte ? Tous les éléments de la réalité sociale (aussi divers que l'argent, la délégation politique, les convictions et les programmes, les groupes d'appartenance ou les archives) existent objectivement parce que collectivement nous y croyons, leur assignons une fonction (de symbolisation, de représentation, de signification), élaborons à côté des faits bruts, objets de sciences, des faits institutionnels, objets des sciences humaines. Par cette grammaire simple des croyances institutionnelles, John R. Searle rappelle toutes les sciences humaines à l'ordre de leurs fondements.
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