Résumé :
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[BDSP. Notice produite par APHPDOC 9CA98R0x. Diffusion soumise à autorisation]. L'hôpital public est engagé depuis plus de cinq ans dans un programme sans précédent de réformes. Ces dernières ambitionnent toutes de créer les outils utiles pour répondre à plusieurs constats alternativement évoqués comme les maux de l'hôpital public : rigidités du fonctionnement et des organisations hospitalières, "déresponsabilisation" des acteurs et concurrence du secteur privé ; l'objectif étant que l'hôpital public ait les moyens de faire mieux dans la prise en charge des patients en améliorant son organisation interne via un plus grand partage des responsabilités entre tous les acteurs hospitaliers. Principale axe de réforme, la tarification à l'activité (T2A). Elle bouscule les modes d'allocation budgétaire des établissements de santé en insistant sur les recettes avant de penser aux dépenses. Demandée par tous mais redoutée par la plupart, cette réforme du financement pose avec une acuité toute particulière la problématique de la modernisation du système hospitalier français face à l'indispensable mais difficile maîtrise des dépenses de santé. Depuis le passage à une T2A à 100%, les acteurs hospitaliers s'interrogent sur le sens de cette réforme tant elle paraît, pour ses détracteurs, antinomique des valeurs du service public et source de rupture dans l'égalité des soins. Fermetures d'activités, rupture dans l'accessibilité aux soins et sélection des patients sont autant de craintes brandies par des professionnels du monde de la santé perturbés par une libéralisation du système de santé. L'avis du CCNE du 28 juin 2007 a posé un constat sévère sur ce mécanisme qui "en privilégiant la comptabilisation des actes techniques au détriment de l'écoute ou d'examens cliniques longs et précis, [] conduit à considérer comme non rentables beaucoup de patients accueillis notamment en médecine générale, en psychiatrie, en gérontologie ou en pédiatrie". Et, le CCNE d'insister que la T2A n'est "qu'un outil de cotation () [qui] ne peut donc guider à elle toute seule la distribution des crédits aux hôpitaux". Le développement constant du périmètre des missions d'intérêt général exclues des tarifs et les différentes garanties assurées pour assurer la prise en charge des personnes les plus vulnérables n'ont pourtant jamais suffit à rassurer les hospitaliers. Si la T2A ne peut avoir pour seule finalité que d'obliger les établissements à se recentrer sur les pathologies les plus rémunératrices et sur les seuls patients les plus solvables, ce serait nier le rôle et la force du service public. Il est sans aucun doute de la responsabilité éthique de tous de protéger l'avenir de l'assurance maladie. C'est pourquoi, la T2A doit être accompagnée d'indispensables mécanismes de régulation afin d'éviter les dérives et visant à garantir une offre de soins accessible et de qualité. Elle doit avant tout être un moyen de valoriser les établissements les plus dynamiques et les plus innovants dans la recherche de l'efficience et à encourager les plus en difficultés à se restructurer en interne mais aussi en coopération avec le monde libéral. Sans ces mécanismes de régulation, voire de correction, cela conduirait effectivement à faire reposer sur les seuls établissements de santé des choix politiques qui les placeraient dans des conditions intolérables pour garantir une offre de soins de qualité. Au final, s'il existe sans doute des améliorations techniques au mécanisme de la T2A, force est de constater que la loi HPST de 2009 n'en a pas remis en cause les fondements mais qu'au contraire elle s'inscrit dans sa filiation. La T2A est en effet l'un des quatre piliers d'une réforme globale voulue en 2007 s'ajoutant à celui de la planification, de la gestion de proximité des acteurs et enfin de l'évaluation des pratiques et certification. Le succès de la démarche est en effet conditionné avant tout par la capacité des hospitaliers publics à impulser tous ces éléments au même moment tant ils sont intimement liés. En conclusion, la T2A doit s'accompagner d'une refonte organisationnelle et managériale des établissements de santé : gestion de proximité, responsabilisation des acteurs et révision des modes de fonctionnement interne sont autant d'éléments qui accompagnent la réussite de la réforme. La mise en oeuvre de cette dernière doit se faire avec du sens, celui de la recherche de l'efficience, du dépenser mieux. C'est le propre d'une réflexion éthique de poser cette question du sens.
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